Cours en ligne et simulateur de thermodynamique appliquée

Problématique des fluides thermodynamiques

Les premiers cycles de réfrigération qui ont été réalisés vers 1875 utilisaient des fluides comme l'ammoniac, le dioxyde de soufre ou le gaz carbonique. Par la suite, dans la première moitié du XXe siècle sont apparus de nouveaux fluides dérivés chlorofluorés du méthane et de l'éthane (les chlorofluorocarbones CFC) et les hydrochlorofluorocarbones (HCFC). Pour des raisons multiples, tant techniques (performances thermodynamiques, compatibilité avec les huiles, joints, métaux, pressions acceptables...) que d'acceptabilité sociale (faibles inflammabilité et toxicité...), ces fluides ont progressivement pris la place des précédents, à l'exception de l'ammoniac, toujours utilisé dans les installations industrielles, notamment agroalimentaires.

En quelques décennies, un CFC et un HCFC, le R12 (CCl2F2) et le R22 (CHClCF2), en sont ainsi venus à représenter à eux seuls 75 % du parc de réfrigération français (en 1998), tandis que l'ensemble des nouveaux fluides dépassait 90 % du total.

Deux préoccupations environnementales sont venues brusquement remettre en cause l'utilisation massive de ces fluides : la rupture de la couche d'ozone et l'augmentation de l'effet de serre. Très rapidement a été prise la décision d'arrêter la production des CFC et des halons, et de remettre en cause celle des HCFC, du fait qu'ils contiennent toujours du chlore. L'ensemble de ces mesures a provoqué pour les industriels de la réfrigération une révolution technologique majeure qui a commencé en 1994 et qui n'est pas terminée.

Impact environnemental

Même si la contribution des composés fluorés à l'augmentation de l'effet de serre est beaucoup plus faible que celle d'autres gaz comme le CO2 ou le CH4, le très fort taux de croissance de leur concentration au cours du siècle dernier a amené la communauté internationale à remettre en cause leur utilisation, du fait de leur rôle dans la destruction de la couche d'ozone.

La manière dont le sujet de la couche d'ozone a été instruit au niveau international est particulièrement exemplaire : après quelques tergiversations, loin d'adopter une attitude conservatrice, les industriels ont globalement appuyé une réglementation contraignante, dans le cadre du le Protocole de Montréal, qui a pris effet début 1989.

Ce n'est pas courant et les raisons de ce comportement sont multiples. Toutefois, il apparaît clairement qu'ils se livrent entre eux à une course technologique où ceux qui ont investi dans les recherches de substituts aux CFC cherchent à valoriser leur avance en préconisant un cadre réglementaire strict limitant les parts de marché de leurs concurrents. Derrière l'apparente convergence de vues se cache donc une bataille industrielle entre quelques grandes compagnies des pays industrialisés et leurs homologues des pays du « Sud », et notamment en Inde et en Chine.

Fluides de remplacement des CFC

On peut regrouper les fluides de remplacement des CFC en trois grandes catégories : les fluides de transition, les fluides à ODP nul, et les fluides à ODP nul et faible GWP.

La solution la plus immédiate pour chercher des fluides de remplacement aux CFC a été de travailler sur les hydrochlorofluorocarbones (HCFC), a priori relativement proches sur le plan chimique, et moins nocifs pour la couche d'ozone. Toutefois, ces fluides à ODP non nul sont soit déjà tous interdits, soit le seront prochainement, de telle sorte qu'ils ne constituent qu'une solution à court terme, d'où leur appellation de fluides de transition.

Sur le plus long terme, les seuls dérivés halogénés acceptables vis-à-vis de la couche d'ozone sont les hydrofluorocarbones (HFC) et les hydrofluoro-oléfines (HFO), qui, ne contenant pas d'atomes de chlore, ont un ODP nul.

Le principal inconvénient des HFC est que, si leur ODP est nul, leur GWP est très élevé (1300 pour le R134a, 3200 pour le R125, 580 pour le R32, 4400 pour le R143a), et que leurs molécules, très stables, ont des durées de vie atmosphérique de plusieurs dizaines voire centaines d'années.

Leur contribution à l'effet de serre est donc potentiellement importante et leur production est à ce titre susceptible d'être remise en cause à plus ou moins brève échéance.

Les HFO sont des fluides fluorés contenant au moins une double liaison carbone. Le principal avantage des HFO est leur faible impact sur l'effet de serre. En effet, leur stabilité est moindre que celle des HFC en raison de la présence de la liaison double. Ces fluides de synthèse ont été redécouverts depuis la première décennie du 21ième siècle et connaissent de nouveaux développements visant à leur permettre de remplacer totalement ou partiellement les HFC (les chimistes proposent aujourd'hui des mélanges de HFO et de HFC).

Certains de ces nouveaux fluides sont déjà disponibles sur le marché comme le R1234yf ou le R1234ze.

Les seuls fluides de substitution sans inconvénient supplémentaire à la fois vis-à-vis de la couche d'ozone et de l'effet de serre sont les fluides non halogénés comme l'ammoniac (R717), le propane (R290), l'isobutane (R600a), le gaz carbonique (R744) et l'eau (R818).

Les trois premiers présentent des contraintes d'inflammabilité (ainsi que de toxicité et de compatibilité avec certains métaux comme le cuivre pour le premier) qui en limitent de fait l'utilisation. Le dernier ne peut être employé pour obtenir des températures négatives, et les cycles au gaz carbonique ont aujourd'hui des efficacités nettement plus faibles que les autres.

Il est enfin possible d'utiliser des mélanges comme fluides de substitution. Les fabricants de fluides frigorigènes considèrent en effet qu'à l'exception du R134a, il est maintenant peu probable de trouver des fluides purs qui possèdent des propriétés thermodynamiques leur permettant d'être de parfaits substituts aux anciens fluides. En revanche, en mélangeant des fluides purs dans des proportions bien choisies, il est possible d'obtenir des caractéristiques mieux adaptées, ce qui explique l'intérêt que suscitent les mélanges.

Nomenclature

Pour caractériser un réfrigérant, une nomenclature a été établie. On utilise la notation suivante : R-WXYZ.

Les significations des lettres sont :

  • R : signifie Réfrigérant ou fluide frigorigène, mais on trouve parfois HFC, HFO etc...

  • W : représente le nombre de doubles liaisons

  • X : représente le nombre d'atomes de carbone – 1

  • Y : représente le nombre d'atomes d'hydrogène +1

  • Z : représente le nombre d'atomes de fluor

Voici quelques exemples :

  • Nomenclature / composition chimique du réfrigérant :

  • R22 / CHClF2

  • R134a / CF3CH2F

  • R1234yf / CF3CF=CH2

Parmi ces exemples, nous remarquons l'ajout des suffixes « a » ou « yf ». Ces lettres représentent les isomères du fluide organique, qui ont des propriétés physiques et chimiques différentes.

De manière similaire, afin de spécifier un hydrocarbure cyclique, la réglementation impose d'insérer la lettre « C » devant le numéro d'identification du fluide frigorigène.

Des cas particuliers existent, notamment pour représenter les mélanges et les composés non organiques.

Parmi les mélanges, on a coutume de distinguer les mélanges zéotropiques et les mélanges azéotropiques.

Un mélange zéotropique est un mélange dont les compositions en phase vapeur et en phase liquide diffèrent lorsque les deux phases coexistent, le corps le plus volatil s'évaporant plus facilement que le corps le moins volatil. Par conséquent, la température d'ébullition dans l'évaporateur n'est pas constante. Cette différence de températures est appelée le glissement de température.

La série des 400 est attribuée aux mélanges zéotropiques. Les numéros d'identification sont les numéros d'ordre d'enregistrement des mélanges. Les mélanges ayant les mêmes composants ont le même numéro, seule une lettre majuscule en suffixe caractérise la répartition massique des constituants du mélange.

Ainsi, le R410 A est composé, en fraction massique, de 50% de R125 et 50% de R32, et le R410 B est composé de de 55% de R125 et 45% de R32.

Un mélange azéotropique est un mélange de fluides qui se comporte comme un corps pur. La série des 500 est attribuée à ces mélanges.

La série 600 est attribuée aux divers hydrocarbures. Par l'exemple, le R600 représente le butane.

La série des 700 est attribuée aux fluides inorganiques. La règle de nomenclature consiste à rajouter la masse molaire du fluide au numéro de la série 700.Par exemple, R717 désigne l'ammoniac.

Réglementation en vigueur et normes environnementales et de sécurité

Les deux principales réglementations internationales en vigueur sont le protocole de Montréal et le protocole de Kyoto. Les paragraphes qui suivent donnent quelques informations essentielles sur le contenu de ces accords et leurs contextes historiques. Ensuite, nous présentons la norme de sécurité Ashrae 34 permettant de classer les fluides frigorigènes en fonction de leur dangerosité.

Protocole de Montréal

Le « Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone » a pour objectif de réduire et d'éliminer les substances qui appauvrissent la couche d'ozone suite à la mise en évidence de la responsabilité des fluides frigorigènes de synthèse (CFC, HCFC). Basé sur la Convention de Vienne sur la protection de la couche d'ozone adoptée en 1985, le protocole a été signé par 24 pays et par la Communauté européenne en 1987.

Le protocole impose la suppression de l'utilisation des substances appauvrissant la couche d'ozone : sont concernés les fluides chlorés tels que les CFC et HCFC. Depuis 2001, la production et l'utilisation des CFC sont définitivement interdites. Les appareils HCFC neufs sont interdits depuis le 1er janvier 2010. Aujourd'hui, les HCFC ne peuvent plus être utilisés qu'en maintenance pour compléter la charge d'installation existante. Leurs productions seront interdites à partir de 2015.

L'Europe, en anticipant l'interdiction de 2010 d'une dizaine d'années [législation européenne], a contribué au développement des HFC dès les années 90s.

Afin de mesurer l'impact d'un fluide sur la couche d'ozone, l'ODP (Ozone Depleting Potential) est défini comme le rapport de la capacité de destruction de la couche d'ozone d'un fluide donné à celle du R11.

Protocole de Kyoto

La signature du protocole de Montréal a conduit à la disparition progressive des fluides à fort impact sur la couche d'ozone. Cependant en raison de la confirmation du réchauffement climatique par les émissions de gaz à effet de serre, l'impact des fluides frigorigènes sur l'effet de serre prend une place plus en plus importante dans les réglementations. Le protocole de Kyoto est un traité international dont l'objectif est la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Signé en 1997 à Kyoto, ce protocole vise à réduire de 5.2 % les émissions de six gaz à effet de serre. Les gaz comme le dioxyde de carbone, le méthane, le protoxyde d'azote et substituts des CFC sont concernés. Cette diminution des gaz à effet de serre devait s'effectuer entre 2008 et 2012, en ayant comme niveau de référence l'année 1990.

Pour évaluer l'impact d'un gaz sur le réchauffement climatique, le GWP (Global Warming Potential) est défini comme étant le rapport entre la contribution d'une unité du gaz (x) et la contribution d'une unité du gaz de référence (r), en l'occurrence le CO2.

Le GWP exprime le potentiel de réchauffement d'un gaz à effet de serre comparé à celui du dioxyde de carbone. C'est un indicateur de la masse de CO2 émise donnant un effet de réchauffement équivalent à celui de la masse du fluide frigorigène. Etant donné que la durée de vie dans l'atmosphère des ces gaz varie, et donc que leur impact varie au cours du temps, on définit cet indicateur sur une base de 100 ans.

Le projet de modification du règlement européen 842-2006 (F-gas) paru en 2012 tendrait à imposer des contraintes plus strictes à court terme :

  • la recharge d'installations existantes sera interdite pour les fluides dont le GWP est supérieur à 2500 ;

  • il sera interdit d'utiliser des fluides dont le GWP est supérieur à 150 pour les installations neuves.

Ces restrictions conduiraient à la suppression progressive des HFC et à leur remplacement (partiel ou total) par les fluides de 4ième génération, les HFO.

Classification Ashrae des fluides frigorigènes

La norme ANSI/Ashrae 34 classe les caractéristiques de sécurité des fluides frigorigènes sur la base de leur toxicité et de leur inflammabilité.

La notation de groupe de sécurité est composée d'une lettre majuscule et d'un nombre. La lettre et le nombre représentent respectivement le niveau de toxicité et d'inflammabilité du fluide.

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