Cycles de Brayton au CO2 supercritique
Parmi les réacteurs nucléaires envisagés dans l’avenir, un certain nombre permettraient de produire de l’électricité à partir d’architectures mettant en œuvre des turbines à gaz fonctionnant en cycle fermé.
Dans cette exploration dirigée, nous allons étudier le modèle d’un cycle nucléaire à moyenne température utilisant du gaz carbonique supercritique.
Dans cette exploration dirigée, nous allons étudier le modèle d’un cycle nucléaire à moyenne température utilisant du gaz carbonique supercritique.
Le MIT a récemment travaillé sur des cycles utilisant le gaz carbonique supercritique, qu’il considère conduire à des performances meilleures que les autres pour produire de l'électricité à partir de réacteurs nucléaires à températures modérées, comprises entre 650 et 800 °C.
Les partisans de ces cycles affirment que leurs rendements sont, pour cet intervalle de température, supérieurs à ceux des cycles à vapeur et que les machines sont beaucoup plus compactes.
Ces cycles, qui conduisent à d’excellentes performances, présentent cependant l’inconvénient qu’on ne dispose pas aujourd’hui de turbomachines industrielles adaptées, et qu’il faudra de nombreuses années pour les développer.
Plusieurs types de cycles au CO2 supercritique sont envisagés : le plus simple est un cycle de Brayton avec régénérateur (figure ci-contre) les principales variantes mettant en jeu un refroidissement partiel, une pré-compression ou une recompression.
Dans un cycle au CO2 supercritique à régénération simple de 350 MWe environ, un débit de 3 t/s de CO2 sous 200 bars entre dans le réacteur à une température voisine de 330 °C, et en sort à 650 °C. Il est ensuite détendu à la pression de 77 bars dans une turbine. Une régénération prend place entre le CO2 détendu et celui qui entre dans le réacteur. Le CO2 entre alors dans le refroidisseur, dont il sort à 32,5 °C, avant d'être aspiré par le compresseur qui le porte à 200 bars.
Sur le plan thermodynamique, l'intérêt d'utiliser un tel cycle est de bénéficier d'un travail de compression à l'état liquide supercritique beaucoup plus faible que si le fluide de travail reste à l'état gazeux comme dans un cycle de Brayton classique.
Les constantes physiques du gaz carbonique sont les suivantes :
Sur le plan thermodynamique, l'intérêt d'utiliser un tel cycle est de bénéficier d'un travail de compression à l'état liquide supercritique beaucoup plus faible que si le fluide de travail reste à l'état gazeux comme dans un cycle de Brayton classique.
Cette figure montre l'évolution en fonction de la pression en bars du travail de compression isentropique de 1 kg/s de CO2 aspiré à la température indiquée.
Comme on peut le voir, le travail de compression est à peu près divisé par 2 .
Une seconde particularité du CO2 supercritique est que sa capacité thermique massique Cp varie très fortement dans cette zone, comme le montre cette figure, où est tracée l'évolution de cette propriété en fonction de la température, pour différentes pressions.
Il en résulte que le dimensionnement des échangeurs est difficile à réaliser et que des croisements de température peuvent se produire en leur sein.
C'est une contrainte qu'il importe de prendre en compte.
Étudions le cycle de Brayton au CO2 supercritique à régénération.
Cliquez sur le lien suivant : Ouvrir un fichier dans Thermoptim
Vous pouvez aussi :
Le paramétrage de ce modèle nécessite quelques explications.
Le synoptique de ce modèle est donné ci-dessous.
Dans ce cycle au CO2 supercritique à régénération simple de 350 MWe environ, un débit de 3 t/s de CO2 sous 200 bars entre dans le réacteur à une température voisine de 365 °C et en sort à 650 °C.
Il est ensuite détendu à la pression de 77 bars dans une turbine. Une régénération prend place entre le CO2 détendu et celui qui entre dans le réacteur.
Le CO2 entre alors dans le refroidisseur, dont il sort à 32,5 °C, avant d'être aspiré par le compresseur qui le porte à 200 bars.
Le rendement polytropique de la turbine est supposé égal à 0,9, ainsi que l’efficacité du régénérateur.
Le rendement isentropique du compresseur vaut quant à lui 0,85.
Le rendement de ce cycle est un peu supérieur à 35 %. Son analyse et ses perspectives d'amélioration seront abordées dans les étapes suivantes.
Le fluide utilisé pour ce modèle est appelé "CO2sw_CTP". Il s'agit d'un mélange externe de la bibliothèque CTL Lib.
Son modèle correspond à une équation très précise des propriétés du CO2 proposée par R. Span et W. Wagner, le modèle interne du CO2 comme vapeur condensable de Thermoptim étant d'une précision insuffisante à proximité du point critique.
Signalons que, lors du chargement du fichier de projet, il arrive que s'affiche le message : "la température du point est hors limites. Le calcul est impossible".
Répondez "OK". Il s'agit d'une erreur d'affichage non encore résolue, qui n'a pas d'impact sur les calculs ultérieurs.
Commençons par étudier la structure productive du cycle
Pour des rappels sur les structures productives et la création des bilans exergétiques, reportez-vous à cette exploration dirigée.
Voici la structure productive du cycle à régénération.
Elle s'interprète de la manière suivante : en haut à droite de la structure productive, la turbine reçoit du coeur du réacteur un apport d'exergie de 630 MW, ainsi que, par recyclage interne, 59 MW du compresseur et 495 MW du régénérateur. La puissance mécanique de la turbine sert pour partie à entraîner le compresseur, le reste correspondant à la puissance nette.
Comme vous pouvez le constater, les unités productives représentant les transfos échange du régénérateur sont reliées entre elles par un lien destiné à montrer le transfert d'exergie qui prend place en son sein.
La figure ci-dessous montre le bilan exergétique du cycle.
Une particularité du bilan exergétique généré automatiquement est que les échangeurs internes sont représentés par deux lignes (ici « régénération BP » et « régénération HP » pour le régénérateur), et que les contributions aux irréversibilités des deux fluides sont représentées de manière algébrique, positivement pour le fluide chaud et négativement pour le fluide froid, l’irréversibilité de l’ensemble de l’échangeur étant obtenue en faisant la somme de ces deux valeurs. C'est pour cela qu'elles sont indiquées entre parenthèses.
Les températures des sources chaude et froide ont été prises respectivement à 1 200 °C pour le coeur du réacteur et 25 °C pour le fluide de refroidissement.
Notez que le choix de considérer que la source chaude est à 1 200 °C est arbitraire compte tenu des très hautes températures que l'on peut atteindre avec le combustible nucléaire.
Une première remarque est que le rendement exergétique global est voisin de 43 %, ce qui prouve que le cycle est déjà assez performant.
Le bilan exergétique montre que les irréversibilités principales autres que celles du cœur (40,7 %) prennent place dans le régénérateur (41 %), qui travaille en effet avec une DTML de 88,8 °C comme le montre cette figure. Un tel écart de température pénalise fortement le cycle.
Nous allons maintenant étudier comment ce cycle peut être amélioré.
Étudions le cycle de Brayton au CO2 supercritique à précompression.
Une première amélioration consiste à fractionner la compression, avec un refroidissement intermédiaire, opération que nous savons être bénéfique. On qualifie ce cycle de pré-compression.
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Vous pouvez aussi :
Le paramétrage de ce modèle nécessite quelques explications.
Le synoptique de ce modèle est donné ci-dessous.
Dans un tel cycle, la compression est donc bi-étagée, avec refroidissement intermédiaire. Après passage dans le régénérateur à haute température (4-5), un premier compresseur comprime le CO2 de 77 à 100 bars (5-10). Le CO2 précomprimé est refroidi dans le second régénérateur basse température (10-9), puis par échange avec la source froide (9-7). Il est ensuite comprimé à 200 bars (7-8) dans le compresseur principal, puis préchauffé (8-2) par échange avec le flux sortant du précompresseur (10-9). Un deuxième échange (2-6) avec le flux sortant de la turbine permet de poursuivre la réchauffe du CO2 avant entrée dans le réacteur.
Le rendement polytropique de la turbine et du précompresseur sont supposés égaux à 0,9, ainsi que l’efficacité des deux régénérateurs.
Le rendement isentropique du compresseur principal vaut 0,85.
Le rendement de ce cycle est proche de 40 %.
La figure ci-dessous montre le bilan exergétique du nouveau cycle.
Une première remarque est que le rendement exergétique global est voisin de 51 %.
La répartition des irréversibilités est la suivante : 41,6 % dans le cœur, 25 % dans le régénérateur HT dont la DTML est de 59,3 °C, 13,7 % dans le régénérateur BT dont la DTML est de 35 °C, et 10,2 % dans le precooler.
Ce cycle est une amélioration du précédent. Un problème subsiste cependant, comme le montre la figure ci-dessous qui représente l'écran du régénérateur BP . Les capacités thermiques massiques du CO2 des deux fluides étant très différentes, le fluide froid ne se réchauffe que de 80 °C environ, alors que le CO2 chaud se refroidit de 140 °C. L’échangeur est déséquilibré, et la seule manière de le rééquilibrer (et de réduire les irréversibilités internes par hétérogénéité de température) est de diminuer le débit de fluide froid.
C’est précisément ce que fait le cycle à recompression que nous allons étudier maintenant.
Étudions le cycle de Brayton au CO2 supercritique à recompression.
Dans un cycle avec recompression, la compression est bi-étagée, avec réchauffe intermédiaire d'une partie seulement du débit de fluide.
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Vous pouvez aussi :
Le paramétrage de ce modèle nécessite quelques explications.
Le synoptique de ce modèle est donné ci-dessous.
Le débit principal de CO2 sortant du réacteur (3 t/s) est détendu dans la turbine (3-4), puis passe dans un régénérateur à haute température (4-5). Il entre alors dans un second régénérateur à basse température (5-6), avant d'être scindé en deux. 60 % environ du débit est refroidi dans le precooler (6-7), puis comprimé dans le compresseur principal de 77 à 200 bars (7-17), et réchauffé dans le régénérateur BT (17-18). Le débit de CO2 restant est comprimé à 200 bars dans le recompresseur (6-7b), puis mélangé avec l'autre flux sortant du régénérateur BT (point m2). Le débit total est alors réchauffé dans le régénérateur HT (m2-2) avant d'entrer dans le réacteur, et le cycle est ainsi fermé.
Le rendement polytropique de la turbine et du recompresseur sont supposés égaux à 0,9, ainsi que l’efficacité des régénérateurs.
Le rendement isentropique du compresseur principal vaut 0,85.
Le rendement de ce cycle est proche de 46,5 %.
La figure ci-dessous montre le bilan exergétique du nouveau cycle.
Une première remarque est que le rendement exergétique global est voisin de 58 %, ce qui constitue une nette amélioration par rapport aux cycles précédents.
La répartition des irréversibilités est la suivante : 46,8 % dans le cœur, 16 % dans le régénérateur HT dont la DTML est de 42,4 °C, 13,3 % dans le régénérateur BT dont la DTML est de 26,7 °C, et 10,6 % dans le precooler.
L'amélioration des performances vient de ce que le régénérateur BT est beaucoup mieux équilibré sur le plan enthalpique que celui du cycle à précompression du fait qu'une fraction seulement du débit parcourt la partie haute pression, venant ainsi compenser l'augmentation de la capacité thermique massique du CO2 dans la zone supercritique à basse température, comme le montre la figure ci-dessous.
Il existe d'autres variantes, mais ce cycle est à la fois l'un des plus simples et des plus performants.
Les mélanges externes n’étant pas inclus dans Thermoptim, le progiciel ne dispose pas de leurs diagrammes thermodynamiques dans son noyau.
Pour pallier cette limitation, il existe un type particulier de diagramme, appelé diagramme de mélange externe, qui permet d’utiliser des diagrammes entropiques et des frigoristes simplifiés.
La préparation des fonds de diagramme fait appel à une classe externe particulière, appelée CreateMixtureCharts.java, disponible dans la modélothèque.
On se réfèrera à sa documentation pour sa présentation. Il s'agit de diagrammes simplifiés par rapport aux autres en ce sens qu’ils ne présentent que les courbes de bulle et de rosée, ainsi qu’un seul jeu d’isovaleurs, les isobares pour le diagramme entropique, et les isothermes pour le diagramme des frigoristes.
Ces diagrammes étant une variante des diagrammes des vapeurs, leur utilisation est expliquée dans la documentation de ces derniers
Pour accéder à ce diagramme, sélectionnez la ligne “Diagramme Interactifs” du menu “Spécial” de l’écran du simulateur, qui ouvre une interface qui relie le simulateur et le diagramme. Double-cliquez dans le champ situé en haut à gauche de cette interface pour choisir le type de diagramme souhaité (ici “Mélanges externes”).
Une fois le diagramme ouvert, choisissez “Charger le mélange” dans le menu “Données sur le mélange”, et sélectionnez “CO2sw_CTP” dans la liste des mélanges disponibles qui s'affiche.
Sélectionnez ensuite la ligne “Relire le diagramme du mélange” dans le menu “Données sur le mélange”.
Cliquez sur ce bouton
Vous pouvez aussi ouvrir ce cycle de la manière suivante : dans la fenêtre du diagramme, choisissez “Charger un cycle” dans le menu Cycle, et sélectionnez “cycleCO2recompr.txt” dans la liste des cycles disponibles.
Vous obtenez le tracé du cycle dans le diagramme (h, ln(P)).
Les deux compressions apparaissent à gauche du diagramme (7-17) et (6-7b), et la détente (3-4) à droite.
Les échanges de chaleur correspondent aux tracés proches des horizontales.
Pour obtenir le tracé dans le diagramme entropique, il vous suffit de sélectionner la ligne (T,s) dans le menu "Graphe".
Les deux compressions apparaissent à gauche (7-17) et au milieu (6-7b) du diagramme, et la détente (3-4) en haut à droite.
Les échanges de chaleur correspondent aux tracés proches des exponentielles.
Vous pouvez maintenant effectuer des analyses de sensibilité des performances de ce cycle à ses différents paramètres, comme la haute et la basse pression ou encore l’efficacité des régénérateurs.
Dans le paramétrage retenu pour le modèle, la haute pression a été choisie à 200 bars. Faites-la varier de 160 à 240 bars, en paramétrant comme isobares les transfos échange dont les points amont sont à la haute pression pour ne pas avoir à recalculer à la main tous les points.
Etudiez l'évolution des performances du cycle en recalculant le projet autant de fois que nécessaire jusqu'à ce que les éléments du bilan se stabilisent.
Vous devriez observer que les performances augmentent avec la haute pression.
Faites une analyse de sensibilité analogue avec la basse pression, entre 70 et 80 bars.
Vous devriez observer que le meilleur rendement est obtenu pour 77 bars.
Continuez à effectuer des analyses de sensibilité sur les paramètres du modèle qui vous intéressent.
Cette exploration vous a permis de découvrir divers modèles de cycles de Brayton au CO2 supercritique et les paramétrages spécifiques auxquels ils font appel.
Les cycles au CO2 supercritiques apparaissent très intéressants sur le plan thermodynamique.
Deux principales contraintes technologiques existent cependant :
Par ailleurs, ces cycles ne peuvent fonctionner que si l'état du CO2 en sortie du precooler est bien supercritique, ce qui implique une température limite de 32 °C, qui peut être difficile à atteindre lorsque la source froide est l'air extérieur, une rivière ou de l'eau de mer .