Cours de comptabilité générale

Un outil peu adapté à la description de la stratégie de la firme

La stratégie d'une entreprise s'exprime en termes d'objectifs divers, parmi lesquels on peut trouver des éléments évoquant des préoccupations et des motivations bien différentes du seul souci de profit à court terme, comme :

  • la conquête d'une part de marché par un effort de promotion ;

  • le souci d'innovation par un effort de recherche & développement ;

  • le maintien de la paix sociale, en particulier par une progression des salaires ;

  • la diversification des activités de la firme pour la rendre moins vulnérable aux fluctuations de la demande ;

  • l'amélioration de la productivité des installations actuelles ;

  • le désendettement pour acquérir une plus grande indépendance ;

  • etc.

Quelle que soit la méthode utilisée pour mener cette réflexion stratégique, il arrive un moment de cette réflexion où il faut vérifier que les différents projets sont compatibles sur le plan financier.

Or l'information dont on dispose pour décrire le passé est structurée par l'usage d'un modèle ayant force de loi, qui est celui de la comptabilité générale. D'où l'idée encore souvent mise en pratique d'utiliser aussi ce modèle à des fins prospectives, c'est-à-dire de bâtir des comptes de résultat et des bilans prévisionnels.

Mais cette présentation de l'information introduit un biais qui fausse l'explication des projets économiques des entreprises.

On a vu, dans la première partie du cours, que le cadre comptable traditionnel était fondé essentiellement sur des critères juridiques. Le patrimoine, c'est-à-dire l'ensemble des droits et des obligations de l'entreprise vis-à-vis des tiers, y est la notion essentielle ; la comptabilité a comme rôle premier d'indiquer si la disparition de droits (biens ou créances) et l'apparition de dettes nouvelles sont compensées, et si possible au-delà, par l'apparition d'autres droits et par la disparition de dettes anciennes. A ce titre, la comptabilité générale est théoriquement censée assurer la défense des propriétaires et des tiers créanciers. On a vu qu'elle était aussi tournée vers des préoccupations d'ordre fiscal.

Ainsi n'est-il pas étonnant que les dirigeants des entreprises soient conduits à présenter des informations décalées par rapport à la réalité économique, en utilisant dans le sens le moins défavorable les règles comptables d'évaluation, et les possibilités de ventilation dans le temps permises par la loi. Tout pousse dans ce sens, qu'il s'agisse des modalités de calcul de l'impôt, de la nécessité de donner à des actionnaires une certaine image (favorable ou non suivant les circonstances et les objectifs poursuivis), ou encore des critères utilisés habituellement dans la négociation avec les banquiers.

Si la comptabilité générale reste pour l'entreprise un instrument indispensable pour négocier avec l'extérieur, elle est insuffisante pour analyser la cohérence d'une politique.

Cela ne veut pas dire que toutes les informations fournies par la comptabilité d'entreprise soient inutilisables à cet effet. Nous allons voir qu'il est possible de réaménager et de reclasser l'information comptable dans un cadre logique, faisant ressortir de façon parlante les grandes fonctions économiques de l'entreprise et leur articulation, quitte à faire appel dans certains cas à des données d'origine extra-comptable.

Mais avant de présenter ce cadre - que nous appellerons comptabilité économique - il paraît utile d'illustrer ce qui vient d'être dit sur un exemple chiffré.

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